Joseph Ratzinger: Théologie et politique ecclésiale, Communio 6/5 (1981) 29-40[30s] On peut dire, d'une façon tout à fait générale, ceci: si l'on admet que le Big-Bang initial est à l'originedu monde, ce n'est plus la raison qui est la mesure et le fondement de la réalité, mais l'irrationnel: la raisonn'est plus, elle aussi, qu'un produit secondaire de l'irrationnel venu à l'existence par 'hasard et nécessité', etmême par suite d'une erreur, de sorte qu'elle est aussi elle-même, en fin de compte, quelque chosed'irrationnel.Dès lors on ne comprend pas du tout pourquoi on devrait justement voir en elle un étalon de référenceconstant, une instance ultime; comme elle est elle-même irrationnelle, l'irrationnel, sous toutes ses formes,peut revendiquer les mêmes droits qu'elle, à côté d'elle et avec elle.[37-9] Le concept de 'politique de l'Eglise': Pour cela la parole du Christ reste fondamentale: 'Donnez à Dieuce qui est à Dieu et à l'empereur ce qui est à l'empereur' (Mt 22,21). Cette parole a inauguré une nouvellepériode dans l'histoire des rapports entre politique et religion. Jusqu'alors, on admettait tout à faitgénéralement que c'est le politique lui-même qui est le sacré. Il est vrai que l'antiquité tardive connaît elleaussi des groupements de religion libre, ce qu'on appelle les associations de mystères, qui acquirent leurforce d'attraction aux dépens de la religion d'état décadente. Mais la tolérance à leur égard reposait surl'hypothèse que l'État était reconnu comme détenteur d'une sacralité suprême. Il assure le caractèremoralement obligatoire de ses lois, et donc la garantie humaine de son propre maintien, par le fait que seslois, et dans celles-ci l'État lui-même, apparaissent comme l'expression d'une volonté sacrée, divine, et passeulement humaine. Parce qu'elles sont divines, il faut qu'elles restent, pour les hommes, intangibles etabsolument contraignantes.Cette assimilation de la revendication de l'État sur l'homme à la revendication sacrée de la volonté ...