André Manaranche: La rencontre des religionsCommunio 11/2 (1986) 64-76, ici 66ss (sur le dialogue avec l’islam)Mieux connaître l'Islam, c'est faire taire des légendes désobligeantes, des caricatures grossières; c'est stopper ladiffusion de lieux communs entachés d'erreur; c'est ne pas noircir l'autre pour s'en préserver plus efficacement.Mais c'est aussi supprimer des confusions bienveillantes: ainsi, à la fin du 19e siècle, bien des érudits, déçus parl'irrationalisme du dogme chrétien (ex. la Trinité), se sont tournés vers l'Islam comme vers une sorte de religionnaturelle, de philosophie déiste, en oubliant qu'il se veut une révélation, une foi, une 'obéissance' (islam), uneprière. L'homme inquiet a tôt fait de tout ramener à ce qui fait son affaire: une sagesse acceptable et utilisable,et finalement une divinité à son aune. Mieux connaître l'Islam, c'est, par la lecture du Coran et la fréquentationdes croyants, apercevoir des valeurs communes, religieuses et morales, que Vatican II a soulignées (LG 16, NA3), non sans mettre d'imposantes nuances qui découragent tout concordisme sécurisant.Il y a des ombres: 1. Une myopie dans le jugement: Bien des artisans du dialogue, rompus aux contactsindividuels, ont méconnu le phénomène global, l'institution comme telle. Coeurs spontanément offerts maisl'analyse courte, ils ont méconnu, méprisé, les communautés chrétiennes du Moyen-Orient, affrontées auxcommunautés adverses: ils ont estimé, eux, Français, mieux connaître le problème que leurs frères égyptiens,libanais, syriens.Les congrès islamo-chrétiens ont l'inconvénient de réunir quelques personnalités exceptionnelles qui nereprésentent qu'elles-mêmes et dont l'affabilité cache les réactions de la communauté globale ou de sahiérarchie.2. Un fatalisme dans l'appréciation: Depuis 1850, les écritures chrétiennes subissent le feu nourri de la critiquehistorico-littéraire. Les positions abruptes des pionniers ont été tempérées par la suite; on est revenu depréventions injustifi...
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