Guy Bedouelle: De la résistance à l'invention. La vie religieuse face à la modernitéCommunio 28/5-6 (2003) 127-38AntécédentsLes théologiens du 13e siècle furent très sensibles à ce qu'avait de nouveau, la reconnaissance par l'Églisedes ordres mendiants. Ils avaient bien vu que, sous la forme monastique ou canoniale (habit, cloître, viecommune, liturgie publique des heures), il s'agissait d'une autre manière de vivre la consécration religieuse,qui n'impliquait plus la stabilité. Le but des ordres apostoliques était au contraire de se déplacer, d'aller versle monde pour l'évangéliser. Le cloître n'était plus là pour qu'on y demeure mais pour qu'on le retrouve, auretour, comme un espace spirituel, avant de repartir.La rupture avec la vie monastique qu'avaient connue pendant un millénaire l'Occident et l'Orient chrétien,était à la fois flagrante, pour certains, scandaleuse. Il ne s'agissait plus de la vie prévue par la Règle de stBenoît (Bénédictins, Cisterciens) ou par les institutions de la Chartreuse. Un nouveau modèle était proposé,même s'il entendait se prévaloir de l'imitation des apôtres. C'était une adaptation aux besoins pastoraux d'unesociété qui commençait à changer. Les théologiens, prêtres séculiers des universités de Paris et d'Oxford,n'étaient pas mus dans leur protestation contre les ordres mendiants d'abord par la seule envie ou le rejetd'une concurrence ou par une ecclésiologie particulière, mais par leur étonnement de voir reconnue une autreforme de la vie consacrée, plus déterminée par les besoins de la société chrétienne ad extra que par lasanctification personnelle. Certes les chanoines, de Prémontré par exemple ou de Saint-Maurice-d'Agaune,ou du Grand Saint-Bernard, avaient aussi un mode de vie mixte, mais leur implantation était locale et nonuniversitaire.Il y a un 2e affrontement au moment de la Réforme. On a accusé Érasme et à Rabelais d'avoir compromisl'idéal la vie religieuse en dénonçant des abus ou des travers particuliers par leurs sarcasm...