Paul Mommaers: Etre un avec Dieu d'après Jean de Ruusbroec (1294-1381)Communio 1/8 (1976) 77-86"Le mystique ne se fond pas en Dieu mais unit sa volonté à la charité divine qu'il doit donc quotidiennementpratiquer". Ce qui caractérise essentiellement les mystiques, c'est qu'ils sont doués d'un sens psychologiquepropre: ils perçoivent la présence de Dieu avec une évidence dont il leur est impossible de douter. La traditionchrétienne est unanime en ce point: le mystique vit d'une présence amoureuse aspirant à l'unité: il se sait uni àDieu. Ainsi se trouve réalisé le rêve si profondément ancré dans l'humanité depuis ses origines: l'homme faitl'expérience directe de la réalité du sacré du Tout-Autre: il lui est donné d'entrer en contact expérimental avecelle. Pour le mystique chrétien, la promesse qui est au centre du message évangélique: 'Nous viendrons à lui etnous ferons en lui notre demeure' devient une réalité inscrite au coeur même de son expérience psychologique.De nombreuses questions surgissent autour des écrits des auteurs mystiques. En particulier, on ne peut omettrede s'interroger sur la valeur objective et de vérifier l'authenticité de l'expérience dont ils se disent les témoins.De plus, leur témoignage suscite une autre série de problèmes plus fondamentaux encore, relevant de lathéologie. Car d'une part, n'y a-t-il pas une contradiction flagrante entre les données de toi sur la transcendancede Dieu et les textes de tant d'auteurs (eux-mêmes souvent canonisés par l'Eglise et universellement reconnuscomme mystiques) qui affirment, au nom de ce qu'ils expérimentent, qu'ils sont un avec Dieu? A moins de jouersur les mots, il semble impossible de parler de vraie unité avec Dieu si celui-ci n'est pas connu et possédé demanière durable et exhaustive. D'autre part, ne faut-il pas se demander aussi ce que devient l'homme danspareille unité? L''immersion' dans le 'fond' absolu de l'Etre n'entraîne-t-elle pas pour l'homme, créature limitée etcontingente, l'absorption ...
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